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croq'vies - des aperçus, des visages, des instants
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croq'vies - des aperçus, des visages, des instants
  • Vous trouverez ici des histoires, des anecdotes, de ma vie, de ma campagne, de ma vie étudiante, et puis des histoires inventées, juste pour le plaisir. Et j'espère de tout coeur que ce petit mélange sera sympatique. A tout de suite!
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1 mai 2008

Au 26 de ma rue

           Ah ! Le premier logement étudiant ! Quel bonheur !

On se dit qu’on va vivre –enfin !- tranquille, peinard, en se couchant à pas d’heure si on a envie, en osant les grasses matinées jusqu’au milieu de l’après-midi, sans cris, sans prises de tête avec les parents : bref, on l’attend depuis tellement longtemps que l’appart a, depuis notre première prise de chou adolescente, pris une réelle apparence de paradis perdu. Evidemment, on s’aperçoit rapidement que le rêve a des limites, notamment lors de l’emménagement : tout ne tiendra pas à l’intérieur, forcément, l’architecte a prévu des murs beaucoup trop proches les uns des autres ! Mais qu’à cela ne tienne, malgré cette première mini (ouais, boarf, pas tout à fait mini, mais on ne va pas commencer à râler lorsque les portes de la liberté s’ouvrent devant vous !) déception, l’euphorie est à son comble lorsque vous pouvez mettre vos parents à la porte de votre chez-vous tout neuf (pour vous, en tout cas. Il ne faut pas prendre tout au pied de la lettre !) en leur souhaitant un guilleret « A dans trois semaines ! »

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           Les premiers temps, vous ne pouvez vous empêcher de vous émerveiller d’à peu près tout : lorsque vous cuisinez, vous avez l’impression de jouer à la dinette avec vos nouvelles assiettes, (chinées sur une brocante), vos verres et la cruche assortie, qui viennent de Corse (lot sur le vide-grenier annuel de votre village), vos premières casseroles (moins original, achetées en grande surface, mais avec une poignée amovible et un revêtement pour éviter que ça attache, si vous loupez quelque chose des super petits plats que vous vous êtes promis de faire), farfouiller dans votre livre de cuisine pour vous mitonner un petit plat (je suis une gourmande, ma mère est une très bonne cuisinière et mes grands-mères des chefs en gourmandises, alors forcément, les plats tout prêts: c’est pas mon truc !) a des parfums de poésie : la cuisine est devenu un espace merveilleux dédié aux bonheur de vos papilles parce qu’en plus, vous ne mangez que ce que vous aimez, vous ! Vous admirez vos meubles ikéa, après le montage que par miracle, vous n’avez pas compris de travers. Vous avez aussi hérité, (rayez la mention inutile) :grâce à la bonté d’âme naturelle de votre famille / parce que ca prenait de la place dans leurs greniers et que c’était vachement bien de s’en débarrasser avant que ca ne soit une ruine, (fusse chez vous,) / parce que vous êtes une des premières de la troupe des petits-enfants à quitter le cocon familial et que du coup tout le monde s’émeut et veut vous aider/ parce que ca donne à vos oncles et tantes le sentiment de se préparer pour le jour où leurs choupinets encore en maternelle quitteront leur maison à leur tour pour emménager ailleurs /vous avez donc hérité d’un tas de choses. Des meubles, d’abord, qu’on ne peut pas jeter pour des questions d’héritages : sentimental (parfois) et financier (souvent) (oui, tu vois cette armoire : je l’ai arrachée des griffes de ma cousine lors du partage des meubles de notre grand-oncle, sans descendance. Elle la voulait et moi je ne voulais pas qu’elle l’ait. Non je ne la trouvais pas belle, cette armoire, mais je n’aimais pas la cousine, elle n’est même pas venue le veiller avant l’enterrement. Puisque l’armoire est de notre côté de la famille, et qu’on est brouillées avec la branche de la cousine depuis deux générations à cause de ce meuble, question d’héritage, hein !, je me suis dit que je pouvais te la donner, comme ca elle reste de notre côté et on ne pourra pas dire qu’on ne s’en sert pas et que je l’ai réclamée simplement pour ennuyer ma cousine. Tu comprends ? Et puis je suis sûre qu’une fois les toiles d’araignées enlevées, la peinture verte décapée, le traitement pour les vers effectué, peut-être en ponçant les espèces de gargouilles qui servent de décoration sur les portes, -mais c’est pas obligé, tu sais, les modes c’est cyclique, ca sera in dans quelques années- et en remplaçant le dos de l’armoire vermoulu et les pieds bouffés par les souris et une fois cirée, elle aura belle allure, cette armoire ! Tu te rends comptes ! Tous les étudiants ne peuvent pas se vanter d’avoir une armoire de caractère et de 150ans dans leur logement. Heureusement que tu as une famille qui t’aime, hein ?)

          Commençons par le lit : ca tombe bien justement, vos grands-parents en ont un dans leur grenier : celui dans lequel sont nées les générations précédentes dont vous êtes issus, ce même auguste lit où votre arrière arrière grand-père a trépassé, ce lit qui a patienté une bonne cinquantaine d’années dans les greniers des générations successives et susnommées et qui s’offre, après le départ du vieux matelas de duvet des canards de la ferme (–je ne sais pas à combien de générations de canards ca remonte, là, d’autant qu’on employait exclusivement le duvet des canards de la ferme !-) un nouveau départ dans la vie et dans votre piaule étudiante. Vous êtes parvenus à éviter l’armoire dont je viens de vous parler, en prétextant une hauteur de plafond insuffisante pour l’accueillir (il est de pieux mensonges.) puisque l’argument d’une remise en état trop coûteuse avait été balayé d’office. Votre bureau vous suit depuis votre entrée au collège (et se disloque à chaque déplacement, un bonheur !). Et puis il y a les éléments que vous avez chinés sur les brocantes, l’été précédant votre premier emménagement, par exemple la penderie ( 8€ et vous continuez à ne pas regretter l’armoire que sa propriétaire proposera vaillamment à tous les membres de la famille qui vont emménager quelque part, des étudiants aux jeunes couples, sans que personne ne manifeste la moindre envie de la retaper et d’en faire un élément clé de son intérieur, ce qui amènera sans doute l’armoire à pourrir sur place. On la retrouvera dans une trentaine d’années et à votre tour, vous essaierez certainement de la refourguer à un pigeon familial.) ou votre malle (énorme ! comme les malles pour les bateaux, dans le temps) qui vous servira à ranger la presse hebdomadaire pendant la durée de vos études et que vous avez retapée de fond en comble pendant vos semaines de vacances. Vous vous sentez-bien chez vous. La déco vous plait, enfin, celle que vous avez faite avec les posters et les photos de vos potes, les tentures pour cacher les trous dans le mur, bref c’est le bonheur. Même le ménage (sans aspirateur : il n’y a pas assez de place pour le stocker) n’est pas aussi rébarbatif à faire qu’au domicile familial. Il y a peut-être un lien avec la surface que vous avez à entretenir et le temps que cette corvée vous prend. Mais je m’avance.

         Vient le jour où le tout neuf finit par prendre un goût de routine. C’est beaucoup plus rapide que ce que l’on croit ! C’est alors la vie qui se charge de pimenter votre existence en solitaire. A chacun ses expériences. Outre les voisins audibles à toute heure du jour et de la nuit grâce aux murs en carton (on se passerait des scènes de ménages et des réconciliations qui s’ensuivent), les inévitables fuites d’eau, chez votre voisin du dessus, donc chez vous et chez votre voisin du dessous (ô, vieille bâtisse !), les disputes dans le couloir que vous pouvez observer par l’œilleton (ou judas, choisissez selon votre bon plaisir) avant, pour savoir si vous êtes en mesure côté biscottos d’aller leur demander de baisser d’un ton parce qu’il est quand même trois heures du mat’ et vous avez des partiels le lendemain matin, outre le concierge aux pertes de mémoires intempestives et pas franchement aimable (mais c’est son épouse qui remporte la palme du bouledogue, soyons honnêtes), outre les purges de robinetterie chez un voisin de votre côté du couloir -quel que soit l’étage- qui vous permet de prendre vos douches à l’eau froide pendant deux jours (c’est peut-être bon pour la peau et les cheveux, mais pour la bonne humeur, c’est fatal !) outre tous ces petites choses qui font (parait-il !) tout le charme de la vie dans un immeuble, il y a un « truc » en plus. Ce truc, ca peut être n’importe quoi, mais ca donne une touche « unique » à tout ce temps où vous avez vécu là, dans votre super premier logement d’étudiant.  Je vous invite – puisqu’on en parle- à me raconter quel est votre ‘truc’ en plus, les commentaires en bas de l’article, ca peut aussi servir à ça ! ( et à me faire de la lecture, accessoirement !)

            Personnellement, le ‘truc’ en plus, dans mon immeuble, c’est le voisin que j’ai eu pendant deux ans et demi : il était fou. Mais fou, vraiment, il faisait des séjours réguliers en hôpital psychiatrique. Il était dans la vie normale et dès qu’il recommençait à faire des crises de violence, hop ! re- séjour à l’HP. C’est un peu (beaucoup !) stressant. Le concierge m’avait certifié qu’il était calme et sympathique ; surtout depuis qu’il ne faisait plus ses besoins dans les couloirs des étages, qu’il avait cessé de sonner aux portes la nuit ( pas toc, toc avec la main, il préférait la douce mélodie des sonnettes aux cris stridents) et qu’il n’avait plus de chat, qu’il avait installé sur un matelas dans le local du vide-ordures, sans litière (vive l’odeur !), bref, un jeune homme tout à fait charmant. Je me réjouissais secrètement d’avoir échappé aux frasques précédentes et espérais qu’il resterait aussi zen à l’avenir. Mais évidemment cela n’a pas été le cas.

            Il a commencé fort : son appartement étant situé juste en face des escaliers et de l’ascenseur, il m’a observée derrière son œilleton jusqu’à connaître mes horaires de cours et donc de départ et d’arrivée à la fac. Pour mon malheur, je plaisais au bonhomme. Il m’a suivie jusqu’au parking, pour m’aider, soit –disant, et a essayé de me coincer dans l’ascenseur. Heureusement, ce soir là, mon Papa était là et il s’est interposé. Nous sommes rentrés dans l’appartement, mais il a fallu que Papa l’empêche physiquement de pénétrer dans l’appartement pour qu’il me laisse en paix, après avoir menacé mon père de représailles et lui avoir dégoisé un tas d’insanités et de reproches sur l’éducation qu’il m’avait donnée et un « vous êtes un mauvais père car votre fille n’est pas heureuse » que je ne lui pardonnerai jamais. Mais mon Papa étant un agriculteur musclé par les travaux des champs, l’autre a préféré retourner chez lui, à quatre mètres de ma propre porte. La nuit tombée, mon père a dû repartir et à onze heures du soir, mon voisin tentait de défoncer ma porte à grands coups d’épaule. Inutile de vous dire que je n’ai guère dormi, terrorisée à l’idée que la serrure finisse par céder. Mais non. Ouf. Le lendemain midi, je trouvais des CDs dans ma boite aux lettres, or, Monsieur mon Voisin m’avait proposé de me prêter de la musique religieuse, à savoir d’après les étiquettes : Rammstein, Tryo et Les Wriggles. (Imaginez la tête de l’officiant). Je glissais les CDs dans la boite aux lettres de Monsieur mon Voisin et repartais. Je me méfiais, je savais qu’il me guettait, il sortait pour me voir « par hasard » matin et soir, au retour des cours, certains jours il me suivait jusqu’à la fac et en ville : je n’ai rien d’une super héroïne, comme on dit par chez moi : j’avais le trouillomètre à cent.

          Après un séjour à l’hôpital, il est revenu plus calme : il s’est mis à déplacer ses meubles. La  nuit de préférence. Selon une (sa) logique imparable, il voulait se faire des amis : pour cela il faut parler ensemble : or, les gens sont pressés : donc il faut les bloquer pour un certain temps pour qu’ils parlent avec vous. Donc, il déplaçait ses meubles la nuit, les sortait dans le couloir et bloquait en priorité l’ascenseur et l’escalier en priorité et répartissait les reste de ses affaires dans le couloir. Vers sept heures du matin, les premiers travailleurs commencent à partir pour se rendre à leur travail. Sauf que,surprise ! Il est impossible de descendre par l’escalier ou l’ascenseur (la fenêtre est inenvisageable : je vis au 5ème étage) sans aider ce brave Monsieur mon Voisin à ré- emménager tout son bazar. Pour ne pas être trop en retard, les gens acceptent. Et subissent son bavardage, en silence. Monsieur mon Voisin nous a fait le coup régulièrement trois semaines de suite. E en période de partiels, aussi, il alternait entre les nuits ‘meubles dans le couloir’ et les nuits ‘je sonne à toutes les portes’. Il a arraché sa serrure de la porte de son appartement et forcé la porte blindée du bas de l’immeuble : résultat : nouveau séjour en HP.

            Nouvelle idée, puisque l’hiver était là, mais louable cette fois, car à vocation humanitaire. Il partait dans la ville le soir et ramenait les SDF et les alcooliques de la place plum’ chez lui. Après une douche, il les installait pour la nuit, au chaud. Pour une nuit, au moins. Lorsqu’il n’avait plus de place dans son appart, il les faisait dormir dans le couloir. Souvent, c’étaient les propriétaires des chiens qui se retrouvaient dans le couloir. J’allais à la fac en faisant attention de ne déranger personne en enjambant les corps endormis et les chiens protecteurs.

            Monsieur mon Voisin a remarqué un jour que les propriétaires d’animaux familiers ont une certaine facilité à se parler : l’idéal pour nouer des amitiés. Surtout en cette période où les NAC, ou Nouveaux Animaux de Compagnie, sont à la mode. Lui, en l’occurrence, c’est plus que de la mode, c’est du futurisme qu’il nous a fait. Figurez vous qu’il s’est mis à élever des blattes. Vous savez, cette ignoble petite créature, de la même famille que les cafards ? Je vous ai raconté un de mes réveils en tête à tête avec l’un des représentants de l’espèce qui avait élu domicile chez moi dans « Réveil difficile ». Alors Monsieur mon Voisin a commencé son élevage avec un couple de blattes, enfermé dans un vivarium. Il les sortait dans le couloir (pour faire ami-ami avec les propriétaires d’animaux domestiques, il faut que ceux-ci vous voient) Sauf que les blattes, ca se reproduit vite. Très vite. Trop vite. Alors il en a lâché une poignée dans son appartement, puis au milieu du couloir. C’était en août, les étudiants, rentrés dans leurs familles, avaient fermé les volets. Autant dire que nous avions donné un terrain de jeu incroyable à ces horribles bestioles ! En septembre, à mon retour, le sol de mon appartement grouillait, et sur les murs, sous le papier peint, s’agitaient des familles de blattes. L’horreur ! Cela fait maintenant deux ans que je lutte contre elles, je suis une experte en désinsectisation, bombes et pièges à blattes, mais j’ai toujours quelques spécimens de l’espèce dont je n’arrive pas à venir à bout. Argh !!

            La dernière lubie, c’a été au cours du recrépissage extérieur du bâtiment. Plein de bonne volonté, Monsieur mon Voisin a décidé d’aider les ouvriers. Sauf que le faire monter sur un échafaudage, c’est à peu près tout sauf prudent. Les malheureux ont passé plus de temps à l’empêcher de monter sur les échelles, voler la peinture, barbouiller le mur ou repeindre le parking qu’à peindre.

            Et cette année, Monsieur mon Voisin a finalement été jugé inapte à la vie normale, il est dorénavant en hôpital psychiatrique pour toujours. Mais pour que je ne l’oublie jamais, il m’a laissé les blattes !

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Commentaires
O
C'est vrai que c'est dur. J'ai souhaité de toutes mes forces son départ, mais au final mes sentiments sont ambigÜs: passer sa vie en HP... Je souhaitais son départ, mais j'ai honte d'être autant soulagée de son absence.
F
Pauvre homme quand même. Bien que je te plaigne fortement je reste terriblement triste pour lui. =/
O
Heu, bon anniversaire, alors ! (mais où puis-je me cacher dans la seconde?.<br /> Et pour information, les blattes ca ne sert pas uniquement à rendre dingue le colocataire qui subit leur présence! C'est super pour la coordination et la motricité! Mieux que les exercices appris au BAFA: maintenant, je vois, j'ecrabouille et lave tout à la javel en moins de temps qu'il ne faut pour le dire!
F
Coucou ! C'est gentil d'avoir pensé à poster qqch le jour de mon anniversaire ;-) j'ai eu de la lecture (1er cadeau) !!! Et je dois t'avouer que mon estomac a fait quelques bonds (2eme cadeau) ; les blattes c'est pas mon truc alors... <br /> Permet moi de te féliciter pour ton courage et tes nerfs bien accrochés. Moi, j'aurais fui depuis longtemps ! <br /> J'ai remarqué un truc : ta petite histoire fait grands bruits durant les repas de famille !!! Réactions hétérogènes mais tellement drôles... !
O
Comment tu as deviné? Ce n'est pourtant pas si rare des éleveurs de blattes! (rire jaune, moi, je continue de vivre avec!.) En effet, c'est mon voisin le fou qui fait l'objet de ce long texte. Et j'espère pour vous tous qu'on a cassé le moule employé pour le faire lui!
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